dimanche 12 février 2017

Les cendres de la nostalgie

LES CENDRES DE LA NOSTALGIE
2ème partie

Ce chapitre est un recueil à caractère historique, sociologique, culturel et littéraire. Il est dédié à la Bibliothèque Nationale d’Alger et à tous mes amis du Ruisseau. Les photos, articles, commentaires ou autres insérés dans cette rubrique appartiennent dans leur intégralité à l’auteur. Toute reproduction même partielle du contenu de ce chapitre sans l’accord préalable de ce dernier est strictement interdite.

1.      LA PORTÉE DES MOTS ET LE POIDS DES ANS
Le Ruisseau, année 62

Nous sommes regroupés dans cette grande salle à manger face à notre poste de télévision. Le couvert est dressé. Le meuble sur pieds me sert aussi de table d’écolier. Il est 20h. C’est l’heure des informations télévisées : Le crépitement du flash se fait entendre au loin. Le commentateur de l’époque relate l’actualité politique du jour riche en sensation. Le duel Kennedy/Khrouchtchev supplante les évènements d’Algérie encore fraîches. Le conflit américano-soviétique entre dans une phase cruciale. Le fossé s’élargit entre les deux grands. Il prend des proportions alarmantes et tient le monde en haleine. « En bon diplomate », mon père nous disait que la crise de Cuba risque de dégénérer à tout moment en une Troisième Guerre mondiale. La prudence doit être de rigueur. A chacun des antagonistes de faire preuve de sagesse, ajouta-t-il. Ces propos ne m’effleuraient même pas. Je n’y connaissais rien à la politique. J’avais à peine neuf ans. J’étais en classe de cours élémentaire de 2ème année.
J’ai appris beaucoup plus tard par l’entremise des médias et par la plume de ce talentueux écrivain journaliste et grand reporter international, qui eut à couvrir l’évènement, la portée historique de cette crise aux dimensions incommensurables.
Juin 1977, cet homme, invité à la cérémonie de fin d’année à …………… à laquelle furent conviés bon nombre de personnalités françaises et étrangères m’invita en compagnie de deux autres amis à dîner chez lui.
Je téléphonais aussitôt à mon père resté en Algérie pour lui faire part de cette entrevue mémorable.
« Ces propos ne m’effleuraient même pas ». Comme s’il m’avait entendu, ce jour là. Il a fallu attendre quinze ans, le temps que je sois plus mûr, pour que le message passe entre nous deux.

2.      LA PASSION EN HERBE
Les années fin 70

L’Etat-major de cette grande firme internationale ……………… se rend dans la propriété privée de son P.D.G. ………………..* pour l’informer des derniers développements que connaît le monde de l’informatique, en matière de technologie, sur le devant de la scène internationale. Ce dernier se trouvait dans son bureau de travail en compagnie de sa petite-fille toujours prête à lui apporter un peu de gaieté et de chaleur. Ce matin là, elle ne cessa de griffonner sur du papier bristol qu’elle froissait à chaque fois.
Sitôt arrivés, ces messieurs vont s’adonner, tout comme l’exige le protocole à une demi-heure de relaxation (salutations d’usage, apéritifs, tour d’horizon …) avant d’aborder les questions internationales.
Obnubilée par la présence soudaine de tout ce beau monde imprévu, émue par tout ce branle-bas auquel se livrait cette délégation de haut niveau*,  grisée par tant de sollicitudes au point de ne pouvoir plus se retenir, notre petite demoiselle se dressa subitement sur ses petits chaussons et entreprit de jouer le rôle de l’institutrice et d’inculquer et comme il se doit, à ces messieurs trop bavards, les derniers cours de calcul appris la veille. L’assistance tout ouïe s’en est donné à cœur joie et lui a même promis de retenir la leçon. Gêné et confus, le huissier fit son entrée dans la salle, pris sagement la petite fillette par le bras et l’invita à se rendre dans l’autre pièce où il y’a tant de belles choses à voir et à croquer.

……… : Ce dernier s’est rendu, à deux reprises, en ces premières années 80, dans ses ex bureaux situés au ……….. bd Saint Saëns à Alger. Il fut également invité officiel de l’Etat algérien et eut à effectuer en ces mêmes années 80 une visite au Centre National de l’Informatique dont le siège se trouvait à Oued-Smar.
-         Une enfant fragile car issue d’un milieu aristocrate où domine l’aisance dans la parole et les actes. Ce monde privilégié ou plutôt cette manière à elle de se conduire dans sa classe ou dans son école, qui est loin d’appartenir à son entourage, a fait d’elle une élève réservée. La présence de ces messieurs constitue un bon antidote. Elle va lui permettre de monter sur l’estrade et de révéler sa vraie personnalité, jusque là effacée sur les bancs d’école. Une façon de revendiquer haut et fort son appartenance à ce monde. Elle venait de créer son petit monde à elle. Cette fillette, aujourd’hui grande dame a décroché, il y’a plus de quinze ans, le second rang à sa sortie de l’école des Mines.

NIVEAU : Ces messieurs porteurs de cartables bourrés de documents dans une main, attachés-cases dans l’autre main et serviettes sous le bras l’avaient tellement influencée au point de s’identifier à sa maîtresse d’école et de se dire « et pourquoi pas ne pas donner des leçons à ces messieurs trop bavards ». 

3.      MON VIN SERA MONTSERRAT
année 1974

Fervent adepte du jeu de la raquette et de la petite balle, ce jeune homme âgé à peine de 40 ans, connu sous le nom de Montserrat, passait ses longues soirées de week-ends à fréquenter le court de tennis de Bachdjarah*. Un endroit calme, paisible et de bonnes convenances* pour ce jeune loup plein d’entrain et de dynamisme capable de rehausser haut et fort la marque Montserrat face à la dure concurrence nationale, qui n’a pas de prix, et qui l’oppose à l’O.N.C.V *.
C’est à Boumadfaâ, un petit bourg à vocation agricole, distant de près de 30 kms de Khemis-Miliana ex Affreville qu’est situé l’ex domaine dit Château Romain de Montserrat qui portera peu-après l’appellation de Vins Château Romain … . Montserrat fut le premier à commercialiser le vin en carton, bien avant l’O.N.C.V et de très loin …. En 1973/74, l’O.N.C.V lança la « cuvée du Président » et Montserrat fut le seul à lui emboiter le pas avec la « cuvée spéciale Montserrat »……
……. « Mon vin sera Montserrat » tel est le slogan publicitaire apposé sur les bouteilles de vin Montserrat…. C’est également dans ses usines implantées sur les hauteurs du Ravin* de la Femme Sauvage que Montserrat donnera naissance, pour la première fois, à Orangina et Martinazzi Bitter. Deux grandes marques de boissons gazeuses qui iront flirter avec la limonaderie nationale et rivaliser avec celles des pays d’Outre-mer.
Ces premiers succès obtenus à force de labeur ne vont pas sans quelques difficultés ni encombres. Ils vont peser lourd sur la griffe Montserrat qui sera revendiquée par D. …..  qui se dit être seul propriétaire et unique détenteur de la marque Orangina Algérie depuis l’indépendance.
Certains passages expurgés en dernière minute de leur contexte peuvent prêter à confusion dans la lecture du texte.
BACHDJARAH : On est à quelques centaines de mètres de l’ex usine de pneumatiques Michelin.
CONVENANCES : C’est ici, que l’on y côtoie le monde des hautes sphères attiré par les plaisirs mondains (séduction, réception, dîners, voyages …).
O.N.C.V. : L’Office National de Commercialisation des Vins. Un organisme étatique longtemps sous la coupe d’un P.D.G nommé Kara-Terki Mohamed lui-même président de la Fédération Algérienne de Foot-ball.
RAVIN : On n’est pas loin des ex terres vinicoles de Lung Frédéric.

a.     GUERRE DES MARQUES

Concurrence déloyale, usurpation de titre, viol de la propriété industrielle et artistique, dépossession de marques, contrefaçon, non-respect du droit des marques, usurpation de l’identité d’autrui, plagiat….. Autant de conflit d’intérêt à visage à demi-caché. Un pillage qui a pour nom « guerre des marques ».
Les sociétés européennes sont victimes de la guerre des marques. Une nouvelle forme de guerre déloyale menace, en dehors de ses frontières, l’industrie française si prospère du temps de Louis XIV. Cette industrie, parlant seulement de celle de luxe, se trouve confrontée à une nouvelle forme de guerre des marques qui s’est développée à partir de 1977 en Chine, au Brésil, en Afrique du Sud, en Indonésie, à Taiwan, en Thaïlande …. Des pays qui disent avoir de nombreuses bouchées à nourrir. Et c’est là, où la mafia fait la loi.
La partialité des lois, conçues par les barons de la mafia de certains pays d’Amérique du Sud, de l’Asie suivie de corruption, de blanchiment d’argent et du laxisme de l’administration accordent comme par hasard, à un contrefacteur local de déposer la même marque ou presque et d’attaquer ensuite la marque d’origine en « déchéance ». Comme ce fut le cas au Brésil. Ainsi, la marque Lacoste a-t-elle été déchue le 4 mars 1980 à la demande de la société brésilienne Textil Lacoste. Le 15 août de la même année ce fut le tour d’Hermès au profit d’une autre entreprise spécialisée dans la contrefaçon. Le 23 septembre la société Paco Rabanne était « dépossédée » de sa marque au profit d’un Pacco Rabane do Brazil. Enfin, la firme Christofle, implantée au Brésil depuis 1974 se trouve dans l’impossibilité d’attaquer un contrefacteur local qui vend des copies sous les marques Chris, Christof ou Christofoli.

b.     LA PULPE ORANGINA ET LA VALSE DES PROCÉS

Selon ce magistrat, issu de la vieille école coloniale, qui a instruit l’affaire Montserrat / D……………. au début de l’année 1969, une brèche que Montserrat n’a pas pris soin de colmater à temps serait à l’origine de ce vieux procès qui remonte à cette même année. Une faille que le narrateur se garde d’évoquer, a permis à la partie adverse de glisser entre les mailles du filet et de permettre à D……………. d’invoquer ses prétentions et de marquer des points. Montserrat sera débouté par le tribunal d’Alger et sommé de payer les dividendes à D…………… . Une « erreur de parcours » dont il n’avait pas mesuré les risques auparavant et qu’il payera chèrement. On parlera en cette époque de motivations politiques. En fait, Montserrat fut lâché par les siens ou la ………….………… des eaux pour avoir « omis » de prêter allégeance à la cour …. . Attaqués de toutes parts, Montserrat dut se batailler tout seul et finira par baisser les bras.
Aujourd’hui, un autre procès, identique à celui-ci, oppose de nouveau D……………… à une autre entreprise de boissons gazeuses Sidi-el-Kébir de Zaïm et même à Orangina  ………… Pour D…………., rien n’est terminé, il reproche à ……………….. l’ex ministre de l’industrie et du commerce de ne pas être neutre dans le conflit qui oppose Orangina* Algérie à Orangina France et de prendre le parti des Français, dira-t-il. « Il a même mis fin aux fonctions des deux directeurs-généraux de l’Institut National Algérien de la Propriété Industrielle, afin d’éviter que ne soit enregistré au niveau de cet organisme, les deux verdicts judiciaires de l’année 2004, m’accordant, poursuit-il, l’exclusivité quant à la fabrication et la commercialisation d’Orangina en Algérie »*.
Point de vue de l’auteur : Pour rappel, Orangina et Martinazzi, ces deux grands noms de la boisson gazeuse algérienne existait bien avant 1962 et Montserrat fut le seul et unique producteur et distributeur de la marque Orangina France.
Il n’y a pas Orangina Algérie, il y’a une licence donnant tout juste le droit à la production et la commercialisation du produit. Cette licence peut-être retirée à tout moment*.  Et les clauses du contrat peuvent être revues si un litige pouvant porter atteinte à la renommée de la marque apparaît entre les deux parties. Tel est le cas, ici. De ce fait, une grande responsabilité incombe à la ………………… des eaux  qui n’a pas « joué le jeu » et qui doit s’investir davantage.

ORANGINA ALGERIE : Une meilleure façon d’impliquer l’Etat algérien dans le contentieux qui l’oppose à Orangina France et de généraliser ainsi le conflit.
MOMENT : À revoir cette clause qui donne droit comme pour l’éternité, à un plein pouvoir à son titulaire.

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